Collages surréalistes

Le surréalisme est un mouvement littéraire et artistique théorisé par le poète français André Breton, en 1924. Les surréalistes s'opposent aux valeurs morales et esthétiques de la civilisation occidentale, affirmant la prééminence du rêve et de l'inconscient dans la création. André Breton a défini le surréalisme comme "un automatisme psychique pur par lequel on se propose d'exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée". Il le voit comme "une dictée de la pensée, en l'absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique et morale". Inspirés par Sade, Rimbaud ou Mallarmé, et surtout par Lautréamont, les surréalistes cherchent à libérer l'homme du rationalisme de la culture bourgeoisie occidentale, et à libérer le langage de toutes les entraves de la morale et de la connaissance. Breton, marqué par la lecture de Freud, publie en 1924 le premier Manifeste du surréalisme, dans lequel il propose de faire de l'inconscient le nouveau matériau du créateur. De ce fait, le surréalisme a toujours été considéré comme un outil expérimental de la connaissance du monde.

Ernst, Max

Issu de la rupture avec le mouvement Dada en 1922, le surréalisme était, à l'origine, un mouvement essentiellement littéraire, mais il toucha également les arts visuels : peinture, sculpture, photographie et cinéma. Le mouvement a connu son apogée dans l'entre-deux guerres et comptera des artistes tels Eluard, Aragon, Ernst, Mirò, Dali, Vian, Bunuel, Cocteau, Tanguy.

Selon André Breton

 « Il apparaît de plus en plus que l'élément générateur par excellence de ce monde qu'à la place de l'ancien nous entendons faire nôtre, n'est autre chose que ce que les poètes appellent image… Seule l'image, en ce qu'elle a d'imprévu et de soudain, me donne la mesure de la libération possible, et cette libération est si complète qu'elle m'effraie. C'est par la force des images que, par la suite des temps, pourraient bien s'accomplir les "vraies" révolutions. En certaines images il y a déjà l'amorce d'un tremblement de terre. C'est là un singulier pouvoir que détient l'homme, et qu'il peut, s'il le veut, sur une échelle de plus en plus grande, faire subir. »

Dans le Manifeste du Surréalisme, Breton ajoute:

« C'est du rapproche­ment en quelque sorte fortuit des deux termes qu'à jaillit une lumière particulière, la lumière de l'image, à laquelle nous nous montrons infiniment sensibles. La valeur de l'image dépend de la beauté de l'étincelle obtenue. »

Max Ernst

 La technique du collage est particulièrement apte à provoquer cette étincelle. Les surréalistes en furent particulièrement conscients. Le nombre des collages qu'ils ont exécutés en témoigne.

De tous les surréalistes, Max Ernst est certainement celui qui a composé le plus de collages, dont il exécuta les premiers en 1920. Il les réunit dans trois grands recueils qui sont restés en date dans l'histoire du surréalisme: La Femme sans Tête (1929), Rêve d'une petite fille qui voulut entrer au Carmel (1930) et Une Semaine de Bonté ou les Sept Péchés capitaux (1934).

Max Ernst : "Si ce sont les plumes qui font le plumage, ce n'est pas la colle qui fait le collage."

Jacques Prévert

Prévert, Jacques

"Le mot image veut dire ce qu'il veut dire, ce qu'on lui fait dire, aussi bien ce que les gens ont appelé une métaphore : c'est un mot un peu drôle, un peu savant, comme une figure ou un visage de rhétorique, toutes ces choses ont des noms ! Mais du moment qu'on écrit avec de l'encre ou un crayon, on peut faire des images aussi, surtout comme moi, quand on ne sait pas dessiner, on peut faire des images avec de la colle et des ciseaux, et c'est pareil qu'un texte, ça dit la même chose".

Jacques Prévert, cité in "Collages", Gallimard, Paris, 1982

Prévert réalisait déjà depuis longtemps des collages lorsqu'a lieu la première exposition de ses oeuvres picturales, en 1957, à la galerie d'Adrien Maeght. Prévert parlait d'ailleurs plus volontiers d'images ou de montages que de collages. En effet, il s'agissait pour lui de créations nouvelles à partir d'images glanées au fil de ses promenades sur les quais; il faisait des assemblages d'images sans lien entre elles, recréant une nouvelle réalité, détournant les images originales de leur signification pour les métamorphoser. Les collages de Prévert portent la marque du fantastique, de l'étrange et de l'inattendu, caractéristique du surréalisme.

Prévert fut un temps mêlé aux activités du mouvement surréaliste, mais il s'en éloigna progressivement, suite à une querelle avec Breton, qu'il considérait comme trop tyrannique.

Haut de page  ↑