Jean Le Gac est né en 1936 à Tamaris. Professeur de dessin, il n'est guère tenté par une carrière conforme aux tendances qui dominent les années soixante, et ses premières activités (promenades, envois postaux) s'affirment en marge des catégories admises, comme celles de Boltanski qu'il connaît depuis 1966.
Passionné de littérature, il en vient à proposer, d'abord dans de modestes cahiers juxtaposant photos et textes également allusifs, le récit des faits et gestes d'un peintre anonyme : ce matériel narratif l'autorise à se définir comme "artiste-peintre", projetant ses problèmes, ses doutes et ses humeurs sur son double.
Présenté par H. Szeeman à la Documenta V dans le cadre des "Mythologies individuelles", Le Gac est alors intégré dans un "Narrative Art" aux côtés de Boltanski, Messagier ou Gerz. Son travail rejoint progressivement la présentation classique de la peinture : photos et textes (eux-mêmes photographiés) s'organisent en panneaux encadrés, sans renoncer à l'aspect livresque (le Peintre de Tamaris, 1989, Introduction aux œuvres d'un artiste dans mon genre, 1987). Depuis 1981, il reproduit avec les techniques traditionnelles (fusain, pastels) des illustrations empruntées à la littérature populaire, qui permettent à son personnage de vivre de nouvelles aventures, toutes également stéréotypées, et complète ses images par des objets (machine à écrire, appareil photo, projecteur de cinéma) évocateurs d'une mise en scène ou d'une fiction qui n'en finit pas de mettre en abîme ses procédés: l'œuvre de Le Gac s'élabore sur l'absence d'œuvre de son héros.
Je ne parviens plus à croire comme certains que l'art moderne fait encore question. Pour moi, l'histoire de l'art moderne a été vite plébiscitée. C'est aujourd'hui une vieille dame assez conformiste qui ressasse ses souvenirs.Jean Le Gac - Source Wikipédia
Dean Bowen (1957). Peintre graveur et sculpteur australien, il a travaillé avec de nombreux graveurs tel que : Franck Bordas à Paris, John Kerr de Grafica Uno à Milan, Marc Melzassard et Carlos Moreira de l'Atelier URDLA à Lyon connus en France et en Italie.
L'artiste semble privilégier l'estampe, les tons roux et pigments naturels ainsi que les entrelacs ordonnés selon une simplicité primitive.
Inspiré tant par Dubuffet que par les traditions aborigènes, Bowen plaque ses personnages (fermiers ou citadins) sur de drôles de chemins enroulés sur eux-mêmes, les teintes verdâtres ou rougeâtres intégrées dans ses monotypes ou gravures, rappellent les tons retrouvés dans les paysages australiens dont il est issu (terre et verdure).
Le caractère naïf de ses compositions se rapproche de l'illustration pour enfants. Cependant on y retrouve quelque chose d'âpre dans les textures et matériaux qui suscite également des sentiments plus graves.
On retrouve dans les gravures réalisées par l'australien de petites voitures déchaînées grignotant avidement la nature, des bonhommes à grosses têtes et aux yeux exorbités sous des chapeaux de crocodile-dundee, des arbres isolés au milieu des parkings ou oiseaux cernés par des autoroutes qui semblent tous décrire avec humour le sérieux et l'enthousiasme avec lesquels l'Homme se livre à son « inépuisable capacité de nuire ».
Skoda Vladimir, artiste français né à Prague en 1942. Il grandit en ayant un intérêt particulier pour les mathématiques et la physique.
À partir de 1975, le travail du fer et de l’acier, à la forge lui permet de régler le problème de la représentation. L’énergie du corps, dans son rapport à la matière vient s’y substituer. Très vite, les formes issues d’une géométrie simple apparaissent, lui permettant d’articuler ce que lui dicte le matériau au projet. Celui ci déclare être inspiré par le domaine des sciences (cosmologie, astrophysique) mais également par une circonstance plutôt que par un lieu en lui-même.
La main, le geste, l'outil et les matériaux
Un oncle forgeron marque la jeunesse de Vladimir Skoda, de même que son beau-père, le peintre Josef Vacke. Il apprend le métier de tourneur-fraiseur, puis travaillera dans une usine à Prague, sa ville natale, où il découvre le dessin, suit des cours du soir et commence à peindre. Le jeune homme accomplit son service militaire dans l'artillerie lourde, et trouve ensuite un emploi de machiniste au théâtre du conservatoire d'art dramatique.
En 1968, peu de temps avant que les troupes de l'Union soviétique envahissent la Tchécoslovaquie, Vladimir Skoda, alors âgé de 26 ans, quitte Prague pour venir s'installer en France. Il étudie la langue du pays à la faculté des lettres de Grenoble, suit des études à l'École nationale des beaux-arts de Paris, voyage en Italie, visite les musées, s'intéresse à l'arte povera italien et à l'avant-garde artistique qui agite son époque.
Dans ces mêmes années, Robert Morris publie un texte théorique dans la revue Artforum, réfutant un art minimal jugé trop rigide et rationnel : " Les considérations de pesanteur deviennent aussi importantes que les considérations d'espace ", est-il écrit notamment. Bientôt Vladimir Skoda délaisse la peinture, observe le process art et l'antiforme, et engage un travail de sculpture sur le métal.
De là naîtra une œuvre qui ne cessera, à partir d'un axiome sphérique, d'évoluer sur les considérations d'une géométrie céleste. Il développe encore, à l'aide du simple fil de fer, des réalisations, des Pelotes, instituant d'étroites interactions entre la main, le geste, l'outil et les matériaux.
L'expérience physique du métal chaud
Dès 1975, date à laquelle il obtient la nationalité française, Vladimir Skoda amorce ses premiers travaux à la forge. C'est sur l'expérience corporelle et manuelle du métal chaud, dans son rapport tangible à l'acier, qu'il éprouve physiquement les mutations polymorphes de la matière dure. Son art enjambe d'un grand pas l'art conceptuel, axiomatisant des formes universelles, formalisant des valeurs mathématiques.
À la galerie Ilanne, pour sa première exposition intitulée Volume = 3,14 dm3, l'artiste décline brillamment une série de formes obtenues avec une même quantité de matière. Son inventaire iconographique se fait simple et fondamental, la forme quasi minérale et primitive. On commence à l'inviter en Europe, et l'artiste construit en 1979 une œuvre monumentale pour le Symposium Situation 1 à Regensburg, en Allemagne.
Au début des années quatre-vingt, Vladimir Skoda entame une longue collaboration avec la galerie Montenay-Delsol, puis Montenay-Giroux. Les lois qui régissent tant l'infiniment grand que l'infiniment petit, la tenue de la masse dans son espace, les qualités lumineuses et réfléchissantes du traitement de leurs surfaces, s'affirmeront bientôt comme autant de paramètres essentiels.
La " boule " commence à s'imposer lors d'une exposition en Allemagne qui se réfère à la colonne et au socle. Mais la sphère deviendra bientôt la figure tutélaire, première, d'abord d'aspect brut, puis ébauchée, spiralée, tronquée.
En 1987, Suzanne Pagé invite Vladimir Skoda à l'ARC, au musée d'Art moderne de la Ville de Paris. Il y présente une sculpture composée d'une variation échelonnée de dix boules d'acier forgé. Intitulée De l'intérieur, l'œuvre fait écho à une autre façonnée en 1985 à Thiers, lors du Symposium de sculpture monumentale métallique. Elle s'y dresse toujours, à l'extérieur du musée de la Coutellerie.
La galerie Alma, à Lyon, édite par ailleurs une série d'eaux-fortes qui anticipe les avancées de l'artiste dans son titre même, Constellations. Un livre sera édité à cette occasion, avec un texte d'Olivier Kaeppelin.
Dans les années quatre-vingt-dix, les boules sont forgées puis tournées, percées de trous ou scarifiées, et seront à l'occasion ornementées d'une délicate marqueterie en fil de cuivre. En 1992, il expose à la galerie Wittenbrink, à Munich, la première sphère en acier inoxydable réfléchissant, basculant son travail sur les images miroitantes du monde environnant. En 1994-1995, Jean-Pierre Greff l'invite à La Chaufferie, galerie de l'école des arts décoratifs de Strasbourg, Dominique Marchès au centre d'art contemporain de Vassivière en Limousin, et Petr Nedoma le présentera à Prague, à la galerie Rudolfinum.
Un catalogue suivra, avec un texte de Gérard-Georges Lemaire et une biographie détaillée par Dominique Abensour. En 1998, c'est avec l'École nationale d'art de Nancy et encore l'Atelier 340 à Bruxelles qu'il exposera, et, dans les années qui suivront, en Allemagne, au Canada, en Espagne, en Hongrie, en Corée, en Bulgarie, en Roumanie, en République tchèque, en Italie, etc.
La physique sensible, le poétique matérialisé, la lumière et son ombre portée, la profondeur et la légèreté, se fondent et se lissent ici dans un même alliage circonstanciel. La surface sphérique, soyeuse et scintillante comme la voûte céleste, dépasse la finition métallique parfaite. Se positionnant dans le lieu telle une ordonnance astronomique ou un pendule de Foucault, la sculpture situe alors l'espace davantage qu'elle ne s'y installe. Elle semble établir sa propre vision cosmique, et régule de ses motifs striés de véritables mouvements de périodicité.
Frédéric Bouglé