Peter Binoit Peintre allemand d'origine néerlandaise (Cologne v. 1590-1593 – Hanau 1632). Membre d'une famille de protestants réfugiés en Allemagne et rassemblés à Francfort-sur-le-Main et à Hanau, Binoit se spécialisa dans la peinture de fleurs et de natures mortes. Sans doute se forma-t-il chez Daniel Soreau, dont il épousa la nièce en 1627. Son plus ancien tableau connu est daté de 1611. Dès avant 1627, le peintre devait se fixer à Hanau, mais il était aussi actif à Francfort.
Cette œuvre du Musée des Beaux Arts de Mulhouse, peinte sur cuivre nous invite au voyage, à l’exotisme. Les fruits sont disposés dans une coupe en porcelaine probablement de la Compagnie des Indes. Elle laisse apparaître des motifs bleus sur fond blanc, propres à la céramique japonaise. Elle est décorée à l’intérieur et à l’extérieur. Certains fruits sont reconnaissables ; il s’agit de citrons, de grenades, de poires, et d’oranges. Certains fruits présentent quelques feuilles attachées à leur tige. Une grappe d’oranges est déposée sur la table, comme un rameau fruité. Un citron et une grenade sont présentés « ouverts » devant la coupe de fruits.
Le citron présente une découpe franche, la grenade vient d’être ouverte. Ces fruits sont offerts, et ne demandent qu’à être goûtés. Une coupe en or ciselé recueille des sucreries blanches dans son creux. Des oiseaux exotiques, des petits perroquets sont installés de part et d’autre du bord de cette coupe. Un oiseau plus grand est agrippé au bord de la céramique japonaise. Les animaux étaient représentés au même titre que les objets dans les natures mortes. Ils attestent d’une appartenance sociale privilégiée du maître des lieux. Cette nature morte est un portrait, les objets sont métaphoriques de la posture et de ce que le propriétaire, ou le donneur d’ordre (tableau de commande) veut donner comme image. Le fond de l’œuvre est indéterminé. Les lignes de composition convergent du bas vers le haut du tableau de manière oblique pour former un triangle. Deux ellipses formées par la coupelle en or et la coupe en porcelaine se font face. Les oiseaux occupent de manière « symétrique » le bord droit et gauche du tableau. Les couleurs utilisées sont chaudes, les fruits comme les oiseaux arborent les mêmes couleurs.
Desportes Alexandre (Champigneulle, Ardennes, 1661 - Paris, 1743).
Peintre français des XVIIième et XVIIIième siècles, Alexandre-François Desportes est connu pour avoir été l’un des premiers artistes à prendre des animaux et des chasses pour sujets principaux de ses tableaux. Desportes a évolué dans l’univers officiel de la monarchie absolue : il fut d’abord admis à l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture en 1699 (sur présentation de son autoportrait en habit de chasseur, avec un lévrier, un chien d’arrêt et plusieurs pièces de gibier) avant de devenir, de 1700 à sa mort (1743), le peintre attitré des chiens favoris des rois de France Louis XIV et Louis XV. Pour réaliser ses compositions, Desportes avait l’habitude de travailler « d’après nature » à travers des dessins et des esquisses d’animaux, de plantes et de paysages.
Pour être au plus proche de la réalité, Desportes, nommé peintre de la meute royale (vénerie) par Louis XIV, suivait le roi lors de ses chasses à cheval, crayon, plume et papier en mains, attentif à toutes les péripéties.
Il se rendait aussi au chenil pour y dessiner d’après nature les plus beaux chiens. Ces travaux préparatoires lui servaient comme point de départ à de grands tableaux décoratifs qui allaient pour certains orner les demeures royales et pavillons de chasse à Versailles ou Compiègne…Formé dans sa jeunesse auprès d’un maître flamand installé à Paris, Desportes allait s’imprégner de la tradition picturale d’Europe du nord, tout en devenant le maître français du XVIIIième siècle dans le domaine de la peinture animalière.
Ce tableau exposé au Musée des Beaux Arts de Mulhouse, est une nature morte d’Alexandre- François Desportes, peintre officiel de Louis XIV.
La scène semble se jouer sur la terrasse d’un château ou d’une riche demeure. En effet, on y voit une balustrade en marbre finement sculptée, décorée de motifs dorés, et sur laquelle reposent un vase en argent, des roses et un lourd tissu de velours vert. Au pied de cette balustrade sont posés un violon et son archet, un vase en argent rempli de fruits à côté duquel gît du gibier. Nous pouvons aussi observer une cruche, un chou et des radis et un livre de partitions. Un chat arrivant par la droite semble guetter quelque chose.
Le tableau peut se diviser en trois plans : le premier, en bas, est celui des légumes et de la cruche en argent. Le deuxième plan englobe le violon, le vase avec ses fruits, le gibier, le chat, la balustrade et le tissu.
Le troisième et arrière plan montre l’extérieur, avec les roses, l’arbre et le ciel nuageux.
Cette composition apporte un certain équilibre au tableau en lui donnant une certaine amplitude (arrière-plan) et en opposant le premier et le deuxième plan (ce dernier étant plus fourni en détails).
Nous pouvons distinguer deux sources de lumière : celle de l’arrière- plan qui est probablement le soleil (caché par les nuages) et une autre rasante qui semble venir de la gauche (l’ombre de la cruche à droite), et qui suggère l’aube ou le crépuscule.
Elle fait ressortir le blanc du chou- fleur, le pelage des animaux et par dessus tout les fruits dans le vase en argent, rayonnant comme s’ils absorbaient cette lumière (ils sont d’ailleurs au centre du tableau). La lumière est chaleureuse. Elle produit une impression de convivialité et de sécurité et de par les tons chatoyants de l’ensemble du tableau (malgré les animaux morts), elle dégage une certaine impression de vie.
C’est donc une nature moins morte qu’il n’y paraît : la présence de l’arbre, des rosiers en fleur et du chat prêt à bondir contribue à atténuer le caractère de «nature morte». De plus, le violon suggère une présence humaine. Ce tableau symbolise le thème des cinq sens par la présence des roses (odorat), des fruits et des légumes (goût), du pelage des animaux, du marbre lisse ou du tissu (toucher), du violon (l’ouïe) et de la richesse des couleurs (la vue). En outre, ce tableau évoque la fête ou un grand repas car il y a beaucoup de provisions (animaux, végétaux) prêtes à être cuisinées et mangées sur un air de violon.